Des amibes sociales mutantes et communistes, des électrons pervers et immoraux, des bactéries meurtrières fantomatiques, des raies aux pouvoirs télépathiques, des bras tentaculaires aux capacités visionnaires et cette autre espèce très étrange que sont les scientifiques de laboratoire : « L’univers est non seulement plus queer que nous ne l’imaginons, écrit le généticien John B. S. Haldane, il est aussi plus queer que nous ne pouvons l’imaginer. »
Certains continuent pourtant d’objecter que la queerité est nécessairement une question de désir, et que les atomes, les électrons, l’espace et le temps n’ont rien à y faire. Mais quelle forme le désir doit-il prendre pour que seuls certains êtres y aient droit, et pas d’autres ? Que se passerait-il si la nature, loin d’être une bonne chrétienne, était plutôt communiste, perverse ou queer ?
En lisant diffractivement l’interprétation de la physique quantique de Niels Bohr, les études féministes, queer et transgenres les unes à travers les autres, tout en puisant dans l’espace ouvert par les science studies et le poststructuralisme, Karen Barad transforme le sens même de la réalité. À l’aide d’une multitude de créatures et de bien d’autres phénomènes surprenants, son œuvre remet en question les notions habituelles d’identité, de causalité et de responsabilité, révèle le lien intime entre matière et signification et offre un véritable support empirique au déconstructionnisme.
Tandis que les animots de Derrida prennent vie, Barad nous parle de foisonnements chimériques. Il en résulte une véritable ode à Protée, une onto-épistémologie matérialiste et relationnelle… un projet vertigineux de philosophysique.
[note de la maison d'édition]